16 novembre 1999
DU ZIMBABWE, DU PAKISTAN, DU MEXIQUE ET DU CANADA
Des journalistes du Zimbabwe, du Pakistan, du Mexique et du Canada ont été honorés le 15 novembre lors du deuxième Gala international annuel des prix de la Liberté dâexpression, que tenait le groupe des Journalistes canadiens pour la liberté dâexpression (CJFE) à Toronto, au Canada. Mark Chavunduka et Raymond Choto du Zimbabwe, Zafaryab Ahmed du Pakistan et Jesús Barraza Zavata du Mexique ont reçu les Prix 1999 de la liberté de la presse, du CJFE. On a également rendu hommage à lâancien rédacteur en chef du journal âIndo-Canadian Timesâ, Tara Singh Hayer, assassiné le 18 novembre 1998, par la remise dâune plaque commémorative. La conférencière invitée était madame Louise Arbour, juge à la Cour suprême du Canada, qui a présidé le Tribunal pénal international pour les crimes commis en ex-Yougoslavie et au Rwanda. Ont assisté à lâévénement de nombreux médias, des organismes gouvernementaux, des organisations non gouvernementales, des sociétés commerciales et des journalistes vivant en exil au Canada.
Les Prix internationaux de la liberté de la presse du CJFE sont décernés à des journalistes qui, partout dans le monde, âsouffrent à titre personnel et à titre professionnel dans la pratique du journalisme et dans lâexercice de la liberté dâexpressionâ. Collaborateurs au âSunday Standardâ, du Zimbabwe, Chavunduka et Choto ont été détenus illégalement et torturés pour avoir publié âde fausses informationsâ qui, selon les autorités, pourraient mener à la âcrainte et au découragement généralâ. Accusé aux termes de la Loi sur le maintien de lâordre, qui date de 1960, Chavunduka comparaîtra de nouveau le 4 janvier 2000. En recevant leur prix, les deux journalistes ont déclaré ne rien regretter, même après avoir souffert tout ce quâils ont dû subir, et quâils allaient continuer à lutter pour la liberté de la presse au Zimbabwe.
Zafaryab Ahmed est un journaliste pakistanais qui vit en exil aux Ãtats-Unis, où il continue dâécrire sur les violations des droits de la personne et sur le fossé qui sépare les riches et les pauvres au Pakistan. Il fait toujours face à des accusations de trahison et est passible de la peine de mort pour avoir publié des reportages sur le meurtre dâun militant des droits des enfants, Iqbal Masih. Ahmed a déclaré que son prix sâadressaît aussi à ses collègues morts dans lâexercice de leur profession au Pakistan.
Jesús Barraza Zavata est rédacteur en chef du journal âPulsoâ. Il a reçu de nombreuses menaces à cause de son travail sur le trafic de drogue et la corruption au sein du gouvernement mexicain. En raison de la situation dangereuse dans laquelle il se trouve, Barraza nâa pu se rendre au Canada recevoir son prix. Lorsquâil a appris quâil avait été désigné comme lauréat, Barraza a déclaré que cette récompense réalisait deux objectifs : âdâabord, que ceux qui veulent mon assassinat sachent que nous ne sommes pas seuls; ensuite, que mes collègues du âPulsoâ partagent la tâche de savoir que notre travail nâest pas vainâ.
Dans son allocution, Mme la juge Arbour a déclaré quâil peut être difficile de rapporter la âvéritéâ. Elle a décrit les moyens par lesquels les gens au pouvoir sont souvent en mesure de manipuler la vérité et de punir ceux qui les contredisent. Elle a ajouté quâelle désapprouve sans équivoque âlâutilisation des tanks pour museler la presseâ et a invité son auditoire à âdemeurer vigilantâ par la promotion de la liberté de la presse dans le monde. La situation dans les Balkans, entre autres désastres qui frappent le monde, a-t-elle dit, âtrouve son origine dans une mémoire atteinte dâun incurable déficitâ. Mme la juge Arbour a rendu un hommage particulier aux journalistes qui ont couvert les conflits dans lâex-Yougoslavie et au Rwanda, et à ceux avec qui elle a travaillé au Tribunal international.
La soirée sâest terminée sur lâannonce que le Prix de la liberté de la presse au Canada porterait dorénavant le nom de Prix commémoratif Tara-Singh-Hayer, en lâhonneur du journaliste canadien assassiné en novembre 1998. Hayer, qui était le rédacteur en chef respecté du âIndo-Canadian Timesâ, avait reçu des menaces de mort à de nombreuses reprises et avait même échappé à une première tentative dâassassinat avant dâêtre abattu lâan dernier à cause de la couverture sans complaisance quâil assurait de la communauté indo-canadienne. Son fils, David, et sa belle-fille Isabelle, étaient présents à la soirée et ont reçu la plaque commémorative dévoilée à son nom. Isabelle Hayer a déclaré que âtoutes les manifestations dâappui que nous avons reçues, au Canada et à lâétranger, comptent beaucoup pour tous ceux qui poursuivent le travail au journalâ. Les Hayer ont fait remarquer que le cas de leur père démontre quâil est possible que des attaques contre la liberté de la presse se produisent au Canada, et que la détermination de Hayer devrait inspirer tous les journalistes que lâon persécute à cause de leur travail. Hayer est le premier journaliste à être assassiné au Canada pour son travail. Jusquâici, aucune accusation nâa été portée dans cette affaire.